Le cheval de trait : du travail à la tradition.

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Même si les fonctions d’origine des chevaux de trait n’ont plus jamais cours à la même échelle qu’au début du siècle, l’engouement actuel pour le retour à la nature, à la sauvegarde du patrimoine et des traditions, à l’attachement à la terre contribue grandement à la promotion de ces races sauvées in extremis. Nous les retrouvons – certes de façon artisanale – dans des activités de débardage, de labour, de débroussaillage mais aussi dans l’équitation de loisir, l’attelage et les concours. On peut aussi bien les admirer dans des courses montées, des représentations de dressage, des épreuves de trait-tract (courses où les chevaux sont attelés à des traîneaux chargés de centaines de kilos de fonte), dans des numéros de cirque et lors des manifestations folkloriques où elles nous rappellent les “métiers d’antan”. Ces chevaux participent bien sûr à toutes sortes de compétitions d’attelage : épreuves de maniabilité, attelages de tradition, marathons.

un cheval de trait de type shire

 

Le cheval de trait

Vers la fin du XVIIIe et au début du XIXe, en France, notamment au nord de la Loire besognaient de petits chevaux rustiques, vaillants et endurants. Un peu chevaux agricoles, un peu chevaux de charrois, ils étaient peu exigeants en soins et souvent durement menés. Cette population d’équidés présentait des physiques défectueux et ne devait sa survie qu’à une incroyable robustesse. La sélection naturelle n’épargnait que des sujets aux qualités génétiques hors du commun. La révolution industrielle du XIXe siècle allait imposer aux chevaux d’importantes contraintes physiques: transports lourds et longs, naissance des machines agricoles… Malgré leur puissance et résistance, ces animaux de traction n’étaient pas préparés pour de telles tâches.

Des éleveurs s’attachèrent alors à produire des chevaux vifs, aux modèles plutôt légers. Grâce à une sélection rationnelle, ces races de chevaux pleines d’influx vont forcir musculairement et fournir à l’économie nationale les puissants chevaux de trait dont elle a besoin. Les premiers à demander ces chevaux forts et rapides seront les transporteurs routiers, les charrois. Vers le milieu du XIXe siècle, des critères de sélection de la population équine sont définis par des vétérinaires novateurs, sous le contrôle des Haras Nationaux et avec le concours d’éleveurs ouverts à la modernité. Cette forme d’élevage rationnelle donnera à l’économie nationale quelques races phares comme les percherons et les boulonnais. Ces excellents chevaux fractionnaires de diligences vont se développer musculairement et prendre de l’ampleur sans perdre pour autant leur prédominance “lourde”. Dans le commerce international, ils deviendront les rivaux redoutés des sbires, clydesdales, suffolk punch britanniques et du brabançon, le cheval de trait belge.

Judicieusement sélectionnées, de grandes races vont s’imposer: les percherons, les boulonnais, les ardennais, les bretons, les normands… Elles franchiront avec succès le fossé séparant les rustiques bidets et sommiers d’avant la sélection et révolution industrielle des athlétiques chevaux de trait modernes. Avec le XXe siècle apparaîtront de nouvelles races: le trait du Nord, l’auxois et le comtois, tandis que d’autres disparaîtront avant le premier conflit mondial comme le picard, l’artésien, le cauchois, l’alsacien-lorrain, l’auvergnat et le cheval du Morvan. Les chevaux du milieu du XIXe siècle seront les moteurs des véhicules de transport de voyageurs, bien plus que de ceux des outils agricoles, les labours profonds demeurant encore l’apanage des vaches et bœufs.

Du cheval de trait  au moteur

En 1892, le recensement dénombre, en France, 2764529 chevaux utilisés dans de multiples activités. À l’aube du XXe, l’apparition du moteur à explosion entraîne une régression des transports hippomobiles. Le 11 janvier 1913, la Compagnie générale des omnibus de Paris qui possédait encore 17496 chevaux en 1900, assure le dernier voyage du dernier omnibus parisien. En moins de 40 ans, chemins de fer, tramways, métros et automobiles, sans oublier les nouvelles lignes aériennes lancées au milieu des années vingt, vont sonner le glas de la traction chevaline dans les transports des voyageurs.

Mais le nombre de chevaux de trait utilisés en France augmentera néanmoins de près de 500000 têtes dans la première décennie du XXe siècle et l’effectif des chevaux tractionnaires atteindra le chiffre record de 3 222 080. Les importants besoins de l’agriculture moderne naissante expliquent cette augmentation: les machines sont de plus en plus lourdes et la motorisation n’est pas encore véritablement adoptée dans les champs.

Celui que l’on nomme “cheval de labour” a encore bien des années de service devant lui. Au fil des saisons, il va continuer à tirer la charrue, puis la herse, les semoirs, le rouleau, le tombereau chargé de fumier ou de betteraves, la faucheuse, la moissonneuse-lieuse, la grande gerbière ou le chariot, l’arracheuse de pommes de terre, la souleveuse de betteraves et toutes sortes de machines agricoles. Des attelées à 2,3,4 et même 6 chevaux assurent alors la traction d’engins de plus en plus lourds.

En France, en 1938, il est dénombré 2692140 bêtes, dont plus de 90 % sont utilisées dans le monde agricole. L’armée, les transporteurs: charbonniers, glaciers, distributeurs de marchandises ne représentent qu’à peine 10 % de l’effectif total. Même si le tracteur à explosion est déjà présent dans les champs, il ne deviendra réellement fiable que dans les années 1950. Dès lors, le moteur va progressivement supplanter l’animal et transformer le monde rural. Les cochers deviennent chauffeurs, les mariniers des paysans, les rouliers des transporteurs, les maréchaux-ferrants des mécaniciens. .. Par chagrin, certains paysans préféreront changer de métier plutôt que de monter sur un tracteur. Les chevaux ne pouvaient certes pas rivaliser avec le progrès qui offrait le gain de temps, les économies de personnel et le rendement.

Ainsi, à partir de 1955-1960, l’élevage du cheval de trait va fondre comme neige au soleil et les éleveurs orienteront leurs “tractionneurs équins” vers la boucherie. C’est en effet, ce débouché qui sauvera le capital génétique des chevaux de trait d’une disparition totale.

Vers 1970, le cheval de trait prend la dénomination officielle de “cheval lourd”, c’est-à-dire un cheval qui doit être lourd, essentiellement pour la viande. Il va alors s’éloigner rapidement des modèles vifs et puissants des décennies 1930-1940.

Cheval de trait : sauvegarde et tradition

Devant cette modification physique importante et une menace de disparition quasiment inéluctable et inhérente au monde moderne, des éleveurs soucieux de la préservation des types d’origine se sont associés pour prôner le retour des chevaux lourds à un format de cheval de trait classique. Ainsi sont nés “Traits de Génie”

(La plus importante des associations dans ce domaine en France) et bien d’autres organismes régionaux.

Il existe aujourd’hui 9 races françaises: l’ardennais, l’auxois, le boulonnais, le breton, le cob normand, le comtois, le percheron, le trait du Nord et le trait mulassier poitevin.

L’organisation d’événements comme le Festival international des chevaux de trait de Saumur, la Route du poisson (course de relais entre Boulogne-sur-Mer et Paris), la Route des vins et du comté dans le Jura, la Route des écluses en Bourgogne et bien d’autres rallyes en France et à l’étranger contribuent grandement à la promotion des chevaux de trait.

L’avenir du cheval de trait qui se profile donne, en ce début de IIIe millénaire une seconde vie aux ex-commis de l’agriculture.

Pour en savoir plus : le cheval de trait

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