Comment soigner efficacement une toux chez le cheval (2018) ?

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L’intégrité de l’ensemble de l’appareil respiratoire du cheval est essentielle à la réalisation de ses performances lors d’utilisation sportive, il est donc normale d’être inquiété par un cheval qui tousse. L’appareil respiratoire est constitué de voies respiratoires (nez, larynx, trachée, arbre bronchique) et du tissu pulmonaire (parenchyme pulmonaire) constitué d’une multitude d’alvéoles pulmonaires qui constituent une grande surface permettant les échanges gazeux et par conséquent l’oxygénation du sang (fonction d’hématose). Pour que ces échanges gazeux puissent se faire et être efficaces il faut donc une bonne perméabilité des voies respiratoires et une intégrité du parenchyme pulmonaire afin d’éloigner la toux des chevaux.

 

Sur le plan anatomique et fonctionnel, il existe chez le cheval quelques particularités permettant de mieux comprendre certaines affections. Le cheval ne peut naturellement pas respirer par la bouche du fait de la longueur très particulière de son voile du palais. Dans les premières voies respiratoires existent certaines structures semi-élastiques qui sont mobilisées au cours des mouvements respiratoires et peuvent entraîner une gêne au passage de l’air. Enfin dans le territoire pulmonaire, les conduits terminaux de la ramification bronchique, les bronchioles, sont plus longues que dans les autres espèces et possèdent une musculature propre très développée. Par ailleurs, il existe à l’état normal, un certain nombre de communications entre les vaisseaux de la petite et de la grande circulation dans le poumon.

On comprend donc que les affections des premières voies respiratoires sont assez souvent des affections de nature fonctionnelle et particulièrement obstructive (gêne au passage de l’air) et que les affections pulmonaires relèvent souvent d’une atteinte des bronchioles et des alvéoles.

Toux du cheval : Les affections des premières voies respiratoires chez cheval

Elles se traduisent, selon le cas, par un écoulement anormal de secrétions aux nasaux (ce que l’on appelle un jetage), de la toux (qui dans ces cas est une toux forte et grasse), un bruit respiratoire (que l’on appelle un cornage) qui peut être inspiratoire et/ou expiratoire et accompagner une baisse de performance et une intolérance à l’effort. Le jetage peut être unilatéral ou bilatéral, parfois il peut contenir du sang (on parle alors d’épistaxis) ou être présent lorsque le cheval baisse la tête (dans ces cas il provient souvent de cavités particulières que sont les sinus ou les poches gutturales).

Toux du cheval : Les sinusites chez le cheval

Il s’agit d’infections le plus souvent, plus rarement de malformation congénitale, d’inflammation non spécifique ou de tumeur. Les infections sinusales peuvent être primitives (comme une complication de gourme par exemple) ou secondaires à une infection dentaire; en effet, il existe des rapports anatomiques étroits entre le sinus maxillaire et l’arcade molaire. La reconnaissance d’une sinusite repose sur un examen attentif de la cavité buccale, l’examen radiographique des sinus ou encore, à la faveur d’une trépanation, d’un examen endoscopique. Le traitement fait appel à des soins locaux par mise en place de drains pour irriguer et nettoyer les cavités avec des solutions antiseptiques. Un traitement par voie générale peut faire appel à des antibiotiques et à des modificateurs des sécrétions pour favoriser leur élimination.

Toux du cheval : les affections des poches gutturales chez le cheval

Ces structures sont très particulières aux équidés. Il s’agit d’un diverticule de la trompe auditive qui constitue deux poches qui communiquent avec le pharynx. Chacune a un volume d’environ 300 millilitres et est remplie d’air. On ne sait pas encore quel est leur rôle précis. En revanche, on connaît bien leur anatomie et leur pathologie. Deux affections méritent d’être reconnues: l’empyème et les affections mycosiques. L’empyème est une collection purulente plus ou moins importante à l’intérieur d’une ou des deux poches gutturales. Il est généralement dû à l’action pathogène de streptocoques (qui sont les germes les plus souvent isolés) mais d’autres peuvent être incriminés. Il fait partie des complications classiques de la gourme: il s’agit assez souvent de l’abcédation de nœuds lymphatiques en contact étroit avec ces structures déversant le pus dans la cavité des poches gutturales. On a aussi montré que les poches gutturales étaient l’endroit où ces germes responsables de la gourme pouvaient être hébergés même chez des chevaux non malades et qu’elles étaient donc le lieu de portage sain expliquant la récurrence de cette infection au sein d’effectifs. La reconnaissance de l’empyème repose sur l’examen radiographique ou mieux l’examen endoscopique des poches gutturales: il est alors possible de réaliser des prélèvements pour analyse bactériologique et la mise en place de drains. Dans certains cas, il est préférable de réaliser une intervention chirurgicale pour réaliser ce drainage par voie transcutanée.

Les affections mycosiques des poches gutturales ne sont pas rares et peuvent être très graves par l’importance des hémorragies qu’elles engendrent. Pour des raisons encore imparfaitement connues, des champignons peuvent se développer dans les poches gutturales, généralement le long des trajets vasculo-nerveux. En fonction de l’importance de ce développement et de sa localisation, les répercussions seront différentes : il peut s’agir de troubles nerveux, en particulier des troubles de la déglutition ; il peut s’agir de saignements plus ou moins importants, cataclysmiques si c’est la carotide interne qui se rompt. Tout saignement, même mineur, doit nécessiter la réalisation d’un examen endoscopique des poches gutturales pour dépister une éventuelle mycose. Reconnue précocement, un traitement chirurgical visant à supprimer l’irrigation nécessaire au développement du champignon sera proposé.

Toux du cheval : la paralysie laryngée chez le cheval

Il s’agit dans la grande majorité des cas d’une hémiparésie ou d’une hémiparalysie gauche (voir la section affections nerveuses). Elle est responsable d’une obstruction au passage de l’air et entraîne donc l’apparition d’un bruit essentiellement inspiratoire (cheval comeur). En fonction du niveau d’utilisation sportive, cette obstruction entraîne une diminution des performances et un traitement chirurgical visant à réaliser une laryngoplastie peut être envisagé, apportant une amélioration dans environ trois quarts des cas.

Toux du cheval : la pharyngite folliculaire chez le cheval

Il existe une multitude de formations lymphoïdes diversement réparties dans la gorge chez le cheval qui ne possède pas à proprement parler d’amygdales. En fonction du degré d’irritation de cette gorge, provoquée soit par des agents pathogènes (comme certains virus) soit par des irritations mécaniques notamment par des poussières, ces formations peuvent s’hypertrophier et gêner le cheval (douleur lors de la déglutition, toux, cornage). Cette affection est facilement reconnaissable à l’examen endoscopique mais il faut savoir que cette hyperplasie lymphoïde est très souvent observée chez de jeunes chevaux sans qu’ils soient gênés (dans ce cas il s’agit plus de la démonstration de l’irritation permanente notamment par un environnement pollué et il n’est pas nécessaire de proposer un traitement).

Lorsque cette pharyngite est importante, un traitement anti-inflammatoire peut être proposé, par voie locale ou par voie générale.

Toux du cheval : les affections pulmonaires inflammatoires non infectieuses chez le cheval

Elles se traduisent généralement par de la toux (qui est plus ou moins forte, sèche ou au contraire grasse), un essoufflement anormal (au repos ou plus souvent après un effort), une intolérance à l’effort et assez souvent, la présence d’un jetage généralement pas très important mais constant notamment pendant et après un effort. Dans la plupart des cas, des anomalies des mouvements respiratoires sont observés : il s’agit en particulier d’une mobilisation des nasaux au repos et d’une expiration en deux temps, le deuxième correspondant à une poussée des muscles abdominaux pour chasser l’air des alvéoles de façon plus efficace (ce que les anciens appelaient la ligne de pousse).

Le développement de nombreuses techniques d’investigation a permis ces dernières années de mieux comprendre la genèse de ces affections. Il s’agit dans la grande majorité des cas d’une irritation permanente des petites voies respiratoires par ces substances contenues dans les poussières (aéro-contaminants) qui arrivent jusque dans les bronchioles et les alvéoles: elles déclenchent l’apparition d’une inflammation de ces petites voies respiratoires avec production et/ou modification des secrétions, diminution de la taille de la lumière, contraction anormale des muscles péri bronchioliaires ; l’air arrive à aller dans les alvéoles à l’inspiration mais la diminution du calibre des voies respiratoires, plus important à l’expiration, nécessite la participation abdominale à l’expiration (d’où l’apparition de cette expiration en deux temps) ; l’irritation déclenche bien sûr des épisodes de toux qui n’est pas très forte et le plus souvent sèche. On observe d’ailleurs souvent ces affections chez des chevaux vivant dans des box fermés, à moindre degré lorsqu’il y a ouverture sur l’extérieur, et encore moins ou pratiquement pas chez les chevaux au pré.

Il arrive cependant que cette inflammation des petites voies respiratoires soit réellement de nature allergique vis-à-vis d’une substance bien particulière : c’est le cas de certaines moisissures parfois contenues dans du foin mal conservé. On observe les mêmes troubles mais parfois au début ou au cours de l’évolution, des crises de difficultés respiratoires aiguës peuvent faire penser à de réelles crises d’asthme (autrefois appelés accès de pousse), nécessitant des soins en urgence.

La reconnaissance de ces affections repose sur la clinique mais peut également s’appuyer sur des investigations complémentaires (radiographies pulmonaires, endoscopie et réalisation de prélèvements, intradermoréactions, exploration fonctionnelle respiratoire).

La gestion thérapeutique de ces affections nécessite la prescription de mesures hygiéniques portant d’abord sur l’hygiène de l’environnement. Il peut être nécessaire d’administrer des médicaments anti-inflammatoires et des bronchodilatateurs lorsqu’il existe un trouble obstructif majeur. L’administration de ces médicaments peut être réalisée par aérosol ou nébulisation actuellement bien mise au point. Mais tout traitement n’aura de succès que si l’environnement est correct, surtout si une substance est reconnue responsable, son élimination doit être complète et systématique.

Il est extrêmement rare chez le cheval qu’au cours de ces affections il y ait destruction des parois des alvéoles pulmonaires: c’est pourquoi le terme d’emphysème pulmonaire doit être banni du vocabulaire de l’homme de cheval.

Les hémorragies pulmonaires induites à l’exercice constituent une entité bien reconnue chez le cheval de courses, mais également chez le cheval de complet et d’obstacle. Souvent associées à une inflammation des petites voies respiratoires, elles sont observées après un exercice souvent intense mais ne sont pas forcément extériorisées; l’examen endoscopique systématique de chevaux de courses après effort montre que des saignements ont eu lieu sans qu’un jetage hémorragique ne soit observé. On ne connaît pas bien les mécanismes de ces saignements et peu de propositions thérapeutiques ou prophylactiques reconnaissent un consensus.

Toux du cheval : les infections broncho-pulmonaires chez le cheval

Accompagnées d’un syndrome fébrile, au moins au début, elles entraînent des modifications importantes des mouvements respiratoires. Selon leur origine la symptomatologie est plus ou moins grave. Lorsqu’il s’agit d’une infection après une fausse déglutition, les troubles peuvent être très graves et même entraîner la mort du cheval. Lorsqu’il s’agit de complications bactériennes de maladies virales ou de rares complications de maladies strictement inflammatoires initiales, la symptomatologie est variable. Dans tous les cas leur reconnaissance doit être la plus précoce possible pour proposer un traitement antibiotique soutenu, associé à un traitement anti-inflammatoire assorti de mesures hygiéniques portant sur un environnement hors poussières, bien aéré et ventilé.

Mention particulière doit être faite d’une affection heureusement rare, mais classiquement observée notamment après un transport de longue durée ou après un stress provoqué par une épreuve sportive ou une anesthésie par exemple: la pleuropneumonie. Il s’agit d’un infection pulmonaire et pleurale se traduisant par la présence de liquide inflammatoire dans les cavités pleurales. On comprend alors les grandes difficultés respiratoires observées et la nécessité de ponctionner et de drainer ces cavités. D’autres complications, comme une endotoxémie, peuvent assombrir encore le tableau. Le reconnaissance de cette affection doit être précoce et fait appel, au-delà de la clinique, à l’examen radiographique, échographique ou endoscopique.

Il n’échappe pas aujourd’hui à l’homme de cheval les considérables progrès de la médicalisation des équidés en général, du cheval en particulier. Si le sens de l’observation de nos anciens – qu’il est toujours intéressant de lire et de relire, tant leurs descriptions ramènent le clinicien contemporain vers une meilleure démarche sémiologique – a permis le démembrement de nombreuses maladies des équidés, on est frappé aujourd’hui de la technicité au service du médecin du cheval: examens radiographiques, échographiques, scintigraphies et même tomodensitométriques, examens biologiques en tout genre, examens endoscopiques, autant de confort pour l’établissement de diagnostics précis et pour l’instauration de traitements spécifiques et à la pointe du progrès. Croyait-on, il y a trente ans, que la chirurgie abdominale serait un jour possible ou que la chirurgie articulaire serait envisagée? Imaginait-on pouvoir vacciner nos chevaux et mener une lutte antiparasitaire correcte? Pouvait-on caresser l’espoir d’un meilleur suivi gynécologique? C’est aujourd’hui possible et les progrès de cette médecine ne sont pas terminés à en juger par le nombre important de programmes de recherche spécifique au cheval (en pathologie ostéo-articulaire, respiratoire, parasitaire, en reproduction, en néonatalogie, en médecine du sport…)

Cette médicalisation sans cesse en progression est parfaitement justifiée, d’abord pour assurer le bien- être de nos chevaux, qu’ils soient athlètes ou une compagnie pour l’homme, ensuite parce que dans certains domaines (par exemple en infectiologie avec l’émergence ou la réémergence de certaines maladies infectieuses comme le West Nile) le cheval trouve légitimement une place en bio-pathologie comparée; enfin parce que c’est un des devoirs de l’homme que d’assurer, en retour de tous les plaisirs procurés par ce noble animal, la protection des espèces animales domestiques.

Pour en savoir plus : les causes de la toux chez le cheval 

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